Les présidents des deux organisations USP et SNES débattent sur les défis et enjeux de la sécurité privée
Claude Tarlet, président de l’USP et Jean-Pierre Tripet, président du SNES analysent le marché de la sécurité privée, ses perspectives. Un débat animé par Patrick Haas, directeur de publication Agora Mag En toute sécurité.
Les nouveaux enjeux et défis de la sécurité privée tels que le terrorisme, l’armement autorisé en 2018, la collaboration avec les forces de l’ordre, la formation professionnelle, la guerre des prix et le dialogue social, seront abordés.
Quel regard sur l’évolution de l’armement des agents ?
Le transfert de certaines missions vers la sécurité privée a considérablement augmenté depuis 2015. L’évolution entre la filière économique et le pouvoir politique est contrastée, car la profession souhaite davantage de solutions privées avec la volonté de les encadrer si les missions deviennent sensibles notamment sur le port d’armes. C’est une évolution historique pour la profession, car le port d’armes était réservé jusqu’à présent aux forces de l’ordre et aux militaires.
Les organisations USP et SNES ont volontairement posé des barrages naturels en précisant qu’une arme ne peut être confiée à l’ensemble de la profession. Claude Tarlet rappelle à juste titre que les deux organisations ont fait preuve d’une grande responsabilité collective sur ce sujet.
54% des directeurs sécurité se déclarent satisfaits de leur prestataire
Une moyenne basse qui demande un éclaircissement sur la nature du niveau de satisfaction entre « satisfait de leur prestataire » ou « satisfait de la condition économique proposée par le prestataire ».
C. Tarlet souligne que la priorité est de prendre la mesure de la responsabilité partagée entre le client et le prestataire sécurité dans la définition des moyens mis en œuvre.
Les deux présidents attirent l’attention sur la dégradation globale des relations entre le client et l’entreprise elle-même. Les responsabilités doivent être partagées.
Une entreprise ne peut se projeter dans une politique de développement de compétences et offrir des solutions pérennes. Un équilibre est nécessaire dans la relation entre l’acheteur et le prestataire.
42% des budgets sécurité vont être réduits selon un sondage auprès des directeurs sécurité
Selon J.P Tripet, c’est un paradoxe, mais cela s’explique aussi par le fait que les directeurs sécurité ont perdu la main sur le choix du prestataire sécurité au profit des acheteurs qui trouvent beaucoup de force à imposer les prix allant jusqu’au chantage envers le prestataire sécurité. Cela engendre une dégradation des possibilités.
Comment demander à une entreprise qui forme ses agents et dont l’essentiel des charges sont les salaires, de prévoir 3 ans à l’avance une baisse des prix ? Cette conséquence ira vers une dégradation des prestations.
Quelle solution face au manque de dialogue social ?
Une entreprise de sécurité peut créer de la valeur, cela lui permettrait de sortir de la spirale de la guerre des prix et ainsi de nouer des relations plus sereines avec les collaborateurs de l’entreprise.
Selon Claude Tarlet, la réelle difficulté est l’absence de création de valeur. Une entreprise qui ne crée pas de valeur, qui ne sort pas de résultat et qui n’a pas de perspective dans la durée, peut difficilement imaginer la construction d’une stratégie sociale.
La responsabilité et le rôle de l’USP et du SNES sera de convaincre les entreprises de réfléchir ensemble à la manière dont on peut créer un élan social en passant par une opération-vérité car forcé de constater que les codes utilisés depuis années dans le dialogue social ne sont pas les bons aujourd’hui.
Toutefois, C. Tarlet souligne que le problème existe quand on fait peser sur une entreprise des contraintes qui oblige celle-ci au travail dissimulé. Soit par le recours à la sous-traitance dans un cadre qui n’est pas nécessairement un cadre légal et cela contribue à un désordre social, car les salariés n’ont pas de perspective stable dans les entreprises. La création des dynamiques collectives est le principal lien du dialogue social. Aujourd’hui cela ne marche pas, mais notre responsabilité est de faire preuve d’imagination pour que nous soyons capables de lever ces obstacles.
Comment augmenter la valeur ajoutée des agents de sécurité privée et de leur prestation ?
A cette question, Jean-Pierre Tripet confirme que la valeur ajoutée passe par la formation et par l’opportunité d’offrir un véritable plan de carrière à un agent de sécurité. Lorsqu’un agent de base rentre dans nos métiers, aujourd’hui, on n’est pas en mesure de lui proposer un plan de carrière significatif et cela empêche la profession d’attirer un public qui pourrait correspondre aux besoins du secteur.
Jean-Pierre Tripet souligne la grande difficulté de recruter dans la réserve des agents de sécurité qui sont passés par la gendarmerie ou par la police. Les candidats qui se voient proposer un emploi ne sont pas intéressés pour travailler dans nos sociétés, car le ticket d’entrée du salaire n’est pas à la hauteur de leur espérance.
La sécurité privée est-elle victime de son déficit d’image ?
Le déficit d’image est bien réel, car il est dû à la non-reconnaissance de la place réelle de la sécurité privée. À cette question, Jean-Pierre Tripet répond qu’en 35 ans dans le métier, la notion de conseil n’a jamais été vendue aux clients. Les entreprises donnent du conseil et cela n’a jamais été mis en valeur, car on a toujours vendu des heures.
La sécurité privée vit une période cruciale et historique. L’entretien complet animé par P. Haas
Crédits: AgoraMag En toute Sécurité